La décision de la 3e Chambre civile de la Cour de cassation du 4 avril 2019, n° 18-11.207, n° 18-11.208, porte sur la question des mesures conservatoires ou de remise en état en cas de trouble manifestement illicite causé par des travaux incompatibles avec le classement d'une parcelle.
La SCI Les Pacaniers et F. O. étaient respectivement nue-propriétaire et usufruitier d'une parcelle classée en zone A du plan local d'urbanisme, en zone Natura 2000 et en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation. La SCI Les Pacaniers a donné à bail la parcelle à la société BTP Azur. La commune de Fréjus a assigné en référé la SCI Les Pacaniers et F. O., ainsi que la société BTP Azur et son gérant, afin d'obtenir la suspension des travaux et la remise en état des lieux.
Les demandes de la commune de Fréjus ont été accueillies en première instance et en appel.
La question posée à la Cour de cassation est de savoir si les bénéficiaires des travaux irréguliers peuvent être condamnés à cesser les travaux et à remettre les lieux en état, même s'ils ne sont pas les auteurs directs du trouble manifestement illicite.
La Cour de cassation rejette les pourvois. Elle considère que les travaux constitutifs du trouble manifestement illicite sont imputables tant à la société BTP Azur, locataire, qu'à la SCI Les Pacaniers, qui avait consenti en connaissance de cause un bail à cette société pour une activité incompatible avec le classement de la parcelle. De plus, l'usufruitier de la parcelle en percevait les revenus et était donc bénéficiaire des travaux irréguliers réalisés. Par conséquent, la Cour de cassation estime qu'il est justifié de les condamner in solidum à cesser les travaux et à remettre les lieux en état.
Portée : Cette décision confirme que les bénéficiaires des travaux irréguliers peuvent être tenus responsables du trouble manifestement illicite et être condamnés à cesser les travaux et à remettre les lieux en état, même s'ils ne sont pas les auteurs directs de ces travaux. La Cour de cassation souligne ainsi l'importance de la responsabilité des différents acteurs impliqués dans des travaux incompatibles avec les règles d'urbanisme.
Textes visés : Article L. 480-14 du code de l'urbanisme.
: Sur la condamnation des bénéficiaires de travaux réalisés en violation des règles d'urbanisme à une remise en état, à rapprocher : Crim., 29 octobre 1997, pourvoi n° 96-86.093, Bull. crim. 1997, n° 363 (rejet) ; Crim., 6 novembre 2012, pourvoi n° 12-80.841, Bull. crim. 2012, n° 242 (rejet) ; Crim., 8 mars 2016, pourvoi n° 15-82.513, Bull. crim. 2016, n° 70 (rejet) ; Crim., 24 octobre 2017, pourvoi n° 16-87.178, Bull. crim. 2017, n° 235 (rejet).